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L’année 2025 a été marquée par le centenaire de l’Unimev… Quels faits marquants et quelles innovations retenez-vous de ces derniers mois ?
Béatrice Cuif-Mathieu et Philippe Pasquet : 2025 restera l’année des 100 ans, un symbole fort qui rappelle que l’événementiel est un pilier de la vie économique, sociale et culturelle du pays. Parmi les faits marquants, l’édition 2025 de l’Event Data Book confirme la vitalité du secteur : pour 2024, 5,5 milliards d’euros d’investissements, une hausse de 3 % des visiteurs et exposants pour les salons, et de 1 % de surface nette par rapport à 2023. La filière a retrouvé son niveau d’avant crise et continue d’innover, d’investir et de se projeter. Autre moment clé : la signature du nouveau contrat de filière entre les professionnels et les institutions publiques. Dix ans après le premier, il définit une stratégie commune autour de priorités partagées : mesurer la contribution de la filière, accélérer la transition responsable, réinventer l’expérience des publics, innover dans la chaîne de valeur, renforcer l’attractivité des métiers et le rayonnement international. C’est une reconnaissance politique et économique, mais aussi un engagement collectif à faire rayonner la France, ses talents et « le french art de vivre » par l’événementiel. Une filière stratégique qui pèse plus de 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires, 20 milliards de retombées touristiques et 34 milliards de flux d’affaires générés chaque année. Notre ambition est claire : démontrer que l’événementiel n’est pas seulement un moment de rencontre, mais un véritable outil d’influence, de coopération et d’innovation qui connecte les mondes économiques, scientifiques, culturels, sportifs, et qui renforce l’attractivité des territoires.
Vous avez fixé six axes prioritaires pour votre mandat. Quels progrès notables pouvez-vous partager aujourd’hui ?
Béatrice Cuif-Mathieu et Philippe Pasquet : Nous avons structuré notre mandat autour de six axes de transformation. Nous avons déjà des avancées concrètes et des actions structurées. Sur la structuration de la filière et son influence politique. Le contrat de filière, que nous venons de signer, nous donne un cadre stratégique. Il donne de la lisibilité et de la légitimité à la filière. Au-delà de celui-ci, nous continuons à renforcer nos liens à travers le club Événements et Territoires, outil de dialogue avec les parlementaires, les élus locaux, les responsables publics et les professionnels. Sur la vie du réseau, nous avons lancé Unimev Connect, ce qui est unique pour une organisation professionnelle. L’animation de cet outil nous a permis d’enregistrer un taux de participation record aux réunions métiers lors de notre événement annuel See You There qui s’est tenu en juillet dernier à Lyon ! Nous avons aussi renforcé notre présence en région grâce aux délégués régionaux et aux associations régionales avec lesquels nous œuvrons dans les territoires.
Quels sont les autres axes de transformation sur lesquels vous constatez une réelle évolution ?
Béatrice Cuif-Mathieu et Philippe Pasquet : Sur la transition écologique, Cleo Carbone est utilisé par une majorité d’acteurs significatifs de la filière et le développement se poursuit. L’outil a été audité et validé conforme à la méthodologie Bilan Carbone® par l’Association pour la transition bas carbone (ABC). Il leur permet désormais d’avoir la garantie de mesurer leur impact carbone de manière fiable et transparente. Sur l’attractivité des métiers, nous renforçons notre présence auprès des jeunes, créons de nouveaux supports de promotion des métiers et développons des offres de formation plus spécifiques à la filière. Notre industrie, c’est avant tout des femmes et des hommes, des compétences techniques, créatives, logistiques, artistiques… Une véritable « industrie de talents ». Sur la représentativité de la filière, depuis sa création, Unimev a rassemblé un à un les métiers et associations qui la composent aujourd’hui. Structurée en groupements métiers, elle fonctionne comme une fédération réunissant les organisateurs d’événements professionnels et sportifs, les agences événementielles, les gestionnaires de lieux, ainsi que les prestataires au sens large. Cette organisation garantit une représentativité complète et équilibrée de tous les acteurs. Nous sommes par ailleurs très satisfaits d’avoir accueilli Leads qui rassemble les agences de design de stands, et Prestalians qui fédère les prestataires des foires et salons. Leur arrivée renforce la diversité et le poids de notre fédération. Enfin, nous avons mis en place une gouvernance forte au niveau du bureau, du conseil d’administration, et grâce à nos délégués régionaux Unimev nous sommes dans une dynamique collective au service de la filière. Ce fonctionnement rend notre action plus structurée, plus forte et plus visible.
Notre enjeu est de rester l’un des leviers majeurs de croissance pour les entreprises, au service de leur stratégie commerciale et marketing.
Dans un contexte économique et politique incertain, quels sont les principaux défis à relever par la filière événementielle ?
Béatrice Cuif-Mathieu et Philippe Pasquet : Le climat actuel nous oblige à être lucides. La filière fait face à quatre défis immédiats. Être l’un des outils du développement de la filière. Notre enjeu est de rester l’un des leviers majeurs de croissance pour les entreprises, au service de leur stratégie commerciale et marketing. Le média salon représente entre 7 et 15 % du CA des exposants, avec un ROI de 6 à 8. C’est un outil unique d’accélération business, qui élargit le portefeuille de prospects et prépare le chiffre d’affaires de demain. Pour les TPE-PME, il demeure un générateur de croissance ; pour les ETI, un tremplin vers l’international. Notre responsabilité est de renforcer et de moderniser cette valeur ajoutée essentielle à la filière. La pression économique est également forte. Les coûts de production augmentent tandis que nos clients attendent davantage d’impact, dans des délais toujours plus courts et avec des budgets maîtrisés. Nous restons convaincus que l’événementiel n’est pas une dépense, mais un investissement qui génère des affaires, de l’innovation, du tourisme et de l’attractivité pour les territoires. L’attractivité des talents et l’évolution des métiers constituent un autre enjeu majeur. Le secteur a besoin de nouvelles compétences – data, IA, RSE – alors même que certains métiers peinent à recruter ou à fidéliser. C’est un secteur de passion, mais aussi un secteur qui doit démontrer qu’il peut offrir des carrières durables. Vient enfin la question de la reconnaissance stratégique. L’événementiel est encore trop souvent perçu comme une charge et non comme un outil stratégique. Nos actions visent à montrer qu’il contribue pleinement à la souveraineté économique, à l’attractivité des territoires et au lien social. L’État utilise d’ailleurs l’événementiel comme levier de rayonnement – Choose France, VivaTech, le salon de l’agriculture, les JOP… Il ne faudrait pas que les récents messages budgétaires viennent fragiliser ce levier stratégique. À cela s’ajoute un enjeu transversal : la durabilité. Elle nous pousse à repenser la conception, la logistique, les matériaux, les transports et les usages numériques. On ne peut plus faire « comme avant ». La filière l’a très bien compris et s’engage : ISO 20121, économie circulaire, mobilité douce, réemploi, sobriété énergétique…
Quels projets phares Unimev mène-t-elle à court terme pour renforcer la reconnaissance et l’influence de la filière événementielle française ?
Béatrice Cuif-Mathieu et Philippe Pasquet : Trois chantiers sont en cours. Le premier concerne le déploiement du contrat de filière. Il s’agit d’une véritable feuille de route opérationnelle, portée par des actions concrètes, des indicateurs de suivi et une gouvernance partagée entre l’État, les collectivités et les organisations professionnelles. Le deuxième axe vise le renforcement de la mesure et de la preuve. Grâce à l’Event Data Book et à l’Observatoire Unimev, nous disposons désormais de données solides permettant d’objectiver le poids économique, environnemental et social de la filière. C’est indispensable pour peser dans le débat public. Enfin, le troisième chantier porte sur le plaidoyer et le rayonnement. Nous agissons aux niveaux national et international pour que la filière soit pleinement reconnue comme une industrie à part entière. Face à nos concurrents internationaux, nous devons défendre notre French Touch : créative, responsable, innovante et humaine.
Quel rôle l’IA peut-elle jouer dans la conception, la production et l’évaluation des événements ?
Béatrice Cuif-Mathieu et Philippe Pasquet : L’intelligence artificielle ne remplace pas l’événement, elle en augmente la valeur. Avant l’événement, elle aide à mieux connaître les publics, à personnaliser les parcours, à optimiser les contenus et à prévoir les flux. Pendant, elle renforce l’efficacité grâce à l’automatisation, à la reconnaissance d’image, à la traduction en temps réel, à la modélisation 3D ou encore à l’optimisation des ressources et de l’énergie. Cela étant, elle permet de mesurer plus finement la satisfaction, l’engagement, l’empreinte carbone et les retombées économiques. L’IA n’est pas une mode technologique, mais un outil de précision et de créativité, à la seule condition que l’humain reste au centre de ce nouveau mode de fonctionnement.
Propos recueillis par Blandine Fleury


